L'histoire

A la reconquête du vignoble de Prébois. 

J'ai débuté ma carrière professionnelle à Paris, tout en ayant l'opportunité de voyager à travers le monde grâce à mon travail dans l’audiovisuel. Néanmoins, je suis toujours resté profondément attaché à ma terre natale, et le désir de m’installer définitivement à Prébois était constamment présent. C'est au début des années 2000 que m'est venue cette idée, peut-être un peu folle : reconquérir le vignoble de Prébois.


Une idée folle ? Oui, mais soigneusement réfléchie ! Avec un enthousiasme débordant et le soutien de mes proches, j'ai décidé de me lancer dans ce projet de vie et de redynamisation de mon territoire. Mon apprentissage s’est déroulé entre Prébois, Trans-en-Provence chez mon oncle Gérard, Aubagne, Chambéry et Paris. À ce moment-là, je ne mesurais pas encore l’ampleur des défis qui m’attendaient ! 

Il m'a fallu une dizaine d'années et une détermination sans faille pour obtenir les droits de plantation et fonder mon entreprise, le Domaine de l’Obiou. En novembre 2011, j'ai appris que les obstacles législatifs étaient enfin levés. Le signal était donné. Il fallait alors trouver rapidement les financements nécessaires pour couvrir les investissements, dont le coût était considérable. Par la suite, il m’a fallu mener une prospection foncière, retrouver de nombreux propriétaires et conclure des baux pour une trentaine de petites parcelles. Enfin, j'ai entamé la phase de défrichage et d’aménagement de la plupart de ces terres.

à 750m d’altitude, dans le Trièves, entre Vercors et Dévoluy… 

Au printemps 2012, je plante enfin mes premiers pieds de vigne à l’emplacement de l’ancien vignoble, autrefois englouti par la friche. Pendant quatre ans, je poursuis les plantations sur ce parcellaire très morcelé et parviens, tant bien que mal, à récupérer deux vignes en production. Ces premières récoltes marquent le début de l’aventure, permettant au domaine de s’étendre progressivement jusqu’à 2,4 hectares. 

J’ai choisi un encépagement varié. Dans les premières années, j’ai privilégié des cépages précoces comme le Pinot noir, le Gamay, le Pinot gris, le Chardonnay et même le Viognier, afin d’assurer des raisins arrivant à maturité optimale. Par la suite, mon choix s’est porté sur des cépages alpins, réputés plus tardifs, tels que le Persan, la Douce noire, le Joubertin, le Durif, l’Altesse, ainsi que l’Onchette locale. Pour cette dernière, nous avons mené et abouti à une démarche de reclassement, lui permettant d’être inscrite au catalogue des variétés cultivables en France. 

En parallèle de l’implantation de mon vignoble, j’ai aménagé mon propre chai dans l’ancienne bergerie située au sous-sol de ma maison. Après avoir rénové la voûte et le sol, installé l’électricité et l’eau, j’ai pu, en 2017, accueillir mes premières cuves, marquant ainsi l’arrivée des premières vendanges à domicile. 

Dans cette aventure, la patience est essentielle, car selon les variétés, il faut attendre entre trois et cinq ans avant d’espérer une première récolte. Aujourd’hui, je suis fier d’annoncer que mes premiers vins, issus des vendanges 2013, ont été commercialisés en 2015. Depuis, année après année, la récolte et les stocks se développent progressivement. Toutefois, en raison d’une mise en production plus tardive que prévu à notre altitude et des aléas climatiques qui ne nous ont pas épargnés, les cuvées restent encore confidentielles. Bien que modeste, la vendange 2018 marque ma première récolte réellement significative. En 2019, avec une prévision d’environ 3 000 bouteilles bouchées, l’équilibre économique demeure fragile. 

Je façonne mes vins de manière artisanale, dans la tradition paysanne familiale. Je privilégie un processus naturel, laissant au vin le temps de se faire, sans ajout de levures ni d’intrants, hormis une faible quantité de soufre. Pour mes rouges, j’opte pour de longues macérations à température maîtrisée, tandis que mes blancs, après un léger débourbage, fermentent plus doucement à une température modérée. Ensuite, presque tous mes vins passent leur premier hiver en cuve avant d’être élevés environ un an en fût de chêne.

J’ai choisi une production en agriculture biologique, dans le respect de la nature, ce qui demande une vigilance accrue face aux maladies de la vigne. Heureusement, en plus des traitements au soufre et au cuivre, dont je limite soigneusement les doses, la nature environnante de Prébois offre des alliés précieux : prêle, bourdaine et orties, qui, intégrées aux bouillies de traitement, constituent de puissantes protections naturelles pour la vigne.

Dès 2008, face aux difficultés d’installation et dans l’objectif de préserver le vignoble trièvois, un élan de solidarité a vu le jour avec la création de l’association Vignes et Vignerons du Trièves. Rassemblant quelques passionnés, elle m’a soutenu durant mes premières années, notamment dans mes démarches administratives.

L’association a également obtenu des droits de plantation expérimentaux, permettant l’implantation de vignes conservatoires où l’on étudie l’adaptabilité des cépages alpins à notre terroir d’altitude. Par ailleurs, elle a mis en place un système de mutualisation des ressources viticoles et vinicoles en créant un chai collectif et en investissant dans du matériel partagé, mis à disposition des vignerons.

Cette structure constitue un atout essentiel, offrant aux vignerons un accès à un équipement de qualité à moindre coût, tout en favorisant un véritable échange de savoir-faire.

www.vignerons-trieves.com